13 juillet 2009

Un bouquet de maïs


C'est les vacances ! Cette exclamation est généralement suivie d'un borborygme inarticulé, censé exprimer la joie du travailleur qui va enfin pouvoir aller s'aérer la tête et les poumons. A noter d'ailleurs, cette expression, s'aérer la tête, que l'on entend beaucoup de nos jours : moi qui pensait que ne peut s'aérer que ce qui est vide...

Bref, voilà, qui part au bord de la mer, qui sur la mer, qui à la montagne, qui dans sa cambrousse, bref, tout le monde part en villégiature, et ne manque pas de s'en vanter. Si vous ne partez pas vous-même en vacances, vous avez droit à un regard empli de pitié, de commisération, ou même interloqué : tu ne pars pas en vacances ?? mais ça ne se fait pas !

Ben si, je vous rassure, ça se fait très bien. Même si ça n'est plus aussi agréable que les années précédentes. Les vieux parisiens se rappellent encore qu'entre le mois de juillet et le mois d'aout, ils redevenaient proprétaires de leur ville, à condition d'éviter soigneusement les coins à touristes. Si malgré tout on en croisait, on pouvait se donner le luxe de se montrer aimables et accueillants, et parfois même de leur monter un bateau.

Mon père fréquentait un café, tenu par un ami, à côté de la gare Saint-Lazare. Je vous parle de cela, il y a une bonne quarantaine d'années. Un jour a débarqué, venu des Etats-Unis par bateau, puis train, un couple d'américains qui, une fois posés leurs bagages à l'hôtel voisin, sont entrés dans ce bar si parisien.

Une fois la commande passée, et la conversation entamée, ce jeune couple a commencé à parler des endroits qu'ils voulaient visiter, comme le fait tout bon touriste. La Tour Eiffel ? C'est bourré de monde, n'y allez pas, en plus les ascenseurs sont en réparation, vous imaginez, monter ça à pieds ? leur a-t-on répondu. Le Louvre ? Vous savez, il y a tellement de monde, on ne voit pas les tableaux, vous aurez plus vite fait d'acheter des cartes postales...Les Folies Bergères ? Vous n'y pensez pas ! Une arnaque pour touristes ! Tenez, voici monsieur, un homme sérieux, qui vous confirmera. L'homme sérieux, c'était mon père, qui est entré tout de suite dans le jeu, et leur a déconseillé ces spectacles, qui ne valaient pas tripette.

Comme tout cela se passait très gentiment, on leur a offert l'apéro, c'était l'heure, puis ils ont dîné. L'ambiance était chaleureuse et drôle. Ils sont revenus le lendemain matin pour prendre un petit déjeuner français. On leur a fait la conversation. Puis ils ont déjeuné. On leur a offert un pousse-café, et proposé une partie de cartes. Du coup, ils sont restés pour le menu du soir. Le bruit s'était répandu parmi les habitués qui prenaient le relais... Le tout consistait à ne pas les laisser seuls, n'est-ce pas... et voyez-vous, quinze jours plus tard, ce charmant couple est reparti. Ils avaient parcouru près de 12 000 kilomètres aller-retour pour ne pas sortir du quartier. Ils n'ont rien vu - que le trajet entre l'hôtel et le bar. Ils ont laissé un très bon souvenir, et eux-mêmes étaient émus de devoir rentrer. Je certifie la véracité de cette histoire.

Est-il possible aujourd'hui de se livrer à ces saines distractions, entre parisiens ? Force est de constater que cela devient de plus en plus difficile.

Il faut donc voir partir tout le monde - et rester pour monter la garde. Tout en se demandant quels avantages il y a à partir à la campagne. Eh bien, dernièrement, un membre du forum m'a donné une bonne raison. Il était question de tabac en feuilles, et il nous expliquait qu'il était possible de fumer les barbes de maïs, qui poussent en haut des épis quand ils sont murs.

Puisqu'il s'agissait de barbes de maïs, j'ai pensé qu'il serait bon de les fumer dans une pipe maïs, justement. Et je me suis rendu compte que cela faisait un moment que je n'avais pas fumé mes maïs. Pipes d'ici et d'ailleurs, le gros du lot vient de Trever Talbert, quand il vidait son magasin pour ne plus avoir qu'à travailler tranquillement. J'en ai même une, ancienne celle-ci, qui a encore un tuyau en ébonite.

C'est d'ailleurs pour cela que je les abandonne, à cause de leurs tuyaux en plastique si désagréable. On pouvait je crois se procurer des tuyaux en ébonite, mais la demande s'est faite trop rare, je crois.

Je n'entrerai pas dans le détail de leur fabrication. Comme vous l'avez constaté, je ne fais pas un blog en recopiant les informations des autres, ce sont mes élucubrations à moi. Et pourtant ce serait si pratique ! Un article quelque part ? Un événement ? Une information donnée sur les forums ? Pouf, un billet pour le blog ! Eh bien non, je rappellerai juste que les fourneaux sont enduits de plâtre de Paris - et comme chacun le sait, "plâtre de Paris" est l'anagramme de "péril ad patres"...
- On s'en tape
- Bien, je poursuis donc, les fourneaux sont ensuite polis, les têtes aussi, et elles sont vernies. Il n'y a pas plus automatique comme fabrication, c'est fait à la chaine, les tuyaux sont moches, parfois on y retrouve même des petits filtres en papier roulé. J'ai même observé sur quelques unes, une tige rentrant carrément dans le fourneau, et taillée en biseau, ce qui laisse moins de place pour la tabac et ne facilite pas le bourrage. Cependant, je connais peu de fumeurs de pipes qui n'ont pas une ou deux maïs, dans leurs tiroirs. Contrairement à ce que l'on raconte, une pipe en maïs peut durer des années, si on en prend soin.

Ceux qui partent en vacances aiment à les emmener avec eux, parce qu'elles sont solides, et qu'on peut les abimer, ça ne fait qu'ajouter à leur charme.

Avant, on les achetait par douzaine, de par leur faible coût. C'était la pipe du pauvre, du paysan, ou du soldat.

A propos de soldats, je note que depuis les déclarations et nouvelles lois anti-tabac aux Etats-Unis, l'armée américaine reparle d'interdire aux soldats de fumer. Il paraît qu'en Irak et en Afganisthan, ça fume beaucoup chez les soldats, qui doivent être heureux de voir comme on s'occupe de leur bonne santé, entre deux tirs de rockets.