Lors de mon précédent passage dans ces parages, j’évoquais
déjà des pipes de Pierre Morel. Eh bien,
je vais recommencer. Bien sûr, je me rends bien compte que le titre peut
sembler bizarre. Grand écart, ça évoque une figure de gymnastique réclamant une
souplesse certaine, les collants de danse, ça vous a un côté ballet, bref, même
si je ne veux pas méjuger des qualités physiques de Pierre, je ne l’imagine
bien évidemment pas travaillant à la barre, tous les matins, avant d’aller
prendre son petit déjeuner bio.
Mais c’est qu’outre l’elephant foot que j’annonçais en toute
fin du dernier billet, j’ai eu la chance de mettre la main sur une estate
sablée de Pierre. De celles qu’il baptise Raptor. L’une d’entre elles m’était
déjà passée sous le nez, il y a un certain temps. Celle-ci ne m’a pas échappée.
Je me retrouve donc avec deux pipes du même auteur, qui
n’ont, en ce qui concerne leur apparence, strictement aucun rien à voir. Et je
ne peux m’empêcher d’être encore surpris, sachant que ces deux-là viennent des
mêmes mains.
J’aurais
pu aussi titrer « Morel contre Morel », mais il ne s’agit pas d’un
duel. Dans un duel, il y a un gagnant. Mais elles sont si dissemblables qu’en
boxe, elles joueraient dans des catégories différentes. Poids plume pour la
première, 40 grammes, et poids lourd pour la seconde, 104 grammes. Et puis
finalement, s’il y a un gagnant dans l’histoire, c’est moi.
Pierre m’avait demandé de prêter attention au début, à
l’elephant foot, craignant qu’elle ne chauffe. Mais elle est entre de bonnes
mains. Après les premiers fumages, elle a pu se montrer en ville. C’est à ma
connaissance la première elephant foot présentée sur son site. Qu’elle que soit
les formes auxquelles il s’attaque, c’est toujours avec la même réussite et le
même bonheur. J’ai l’impression que Pierre ne peut pas être pris en défaut, au
cas où quelqu’un s’ingénierait à le piéger en lui demandant une forme
particulière. Cela vaudrait d’ailleurs le coup de lui poser la question :
il y aurait-il une forme dont il aurait tendance à se méfier comme de la
peste ? Mis à part les croquis bizarroïdes qu’il pourrait recevoir de
fans, persuadés qu’ils vont marquer le coup avec une forme jamais faite
auparavant – et pour cause ?
Quant à la tomato sablée, étant déjà fumée, je n’ai pas eu à
prendre de précautions particulières, et j’ai pu y aller franco. Vu son
gabarit, pas question d’avoir les deux mains occupées. Ce n’est pas une pipe de
clavier, plutôt une pipe de fauteuil. Et avec un large fourneau, autant avoir du
temps devant soi. J’étais je dois dire, un peu dubitatif : la personne qui
me l’a vendue m’avait dit que si finalement, je la trouvais trop grosse dondon,
je pouvais la lui renvoyer. Mais elle tient bien sa place en main, et c’est
peut-être son côté bonbonne qui rassure. Donc, je la garde. Le seul souci,
c’est qu’à peine éteinte, je regrette de ne pas en avoir plus comme celle-là.
Et même si à les voir, on a l’impression qu’elles ne
fréquentent pas le même monde, je peux vous assurer qu’elles s’entendent très
bien.
D’autre part, un petit clin d’œil. J’ai pu me procurer sur
un site d’enchères deux serre-livres réalisés par Morel père. Il me semble
qu’ils ont leur place ici. J’avais déjà évoquée une sculpture signée Pehem, en
notant un sens du trait, de l’efficacité, bref, cette élégance qui consiste à
donner l’impression qu’il y a eu le minimum de travail. Voici donc ces deux
ours. Je pense qu’on doit pouvoir en trouver d’autres. Je ne sais combien il y
en a eu de réalisés, et d’ailleurs là n’est pas la question. Mais je crois que
ce sont deux petits chefs-d’œuvre. Je ne leur ai pas encore trouvé de place,
parce que je voudrais les avoir à vue. Ils passent donc de la table basse, au
meuble télé. J’ai noté que mon chat apprécie de s’installer au milieu.